De nouvelles technologies permettent aujourd’hui d’intégrer plus de contrôles exhaustifs à la démarche d’audit des comptes, traditionnellement plutôt basée sur de l’échantillonnage. Les commissaires aux comptes peuvent ainsi mieux orienter leurs contrôles, gagner en temps et en efficacité pour construire leurs conclusions et améliorer le service rendu à leurs clients.
Chargés de certifier les comptes des entreprises, les commissaires aux comptes (CAC) sont les garants de la sincérité et de la fiabilité des informations financières émises, et donc de la confiance entre les acteurs économiques. Leur pratique et les modalités de l’audit légal sont particulièrement encadrées, à travers des normes d’exercice professionnel (NEP) et des normes internationales d’audit (ISA).
L’échantillonnage, méthode traditionnelle de l’audit
Le CAC n’est pas tenu par une obligation de résultat mais par une obligation de moyens. Mais il ne peut matériellement pas contrôler en quelques jours l’ensemble des écritures comptables d’une entreprise. Il procède de manière à se construire une assurance raisonnable que les comptes sont sincères, réguliers et fidèles à la réalité. Y parvenir sans « sur-auditer » est aussi un gage de son professionnalisme.
Il adopte pour cela une approche par les risques et définit les analyses à mener en fonction de sa connaissance de la structure auditée et de son jugement professionnel. Certaines sections des comptes peuvent être examinées exhaustivement et au centime près, comme la trésorerie. D’autres, comme les achats fournisseurs, le sont par échantillonnage : le CAC vérifie une part représentative des données. La NEP-530 le guide alors dans la construction de cet échantillon.
Rigoureuse, cette technique permet d’aboutir à des conclusions probantes mais comporte des limites, dont le risque de passer à côté de plusieurs anomalies qui, agrégées, pourraient affecter l’opinion de l’auditeur. L’extrapolation des résultats à l’entièreté des données peut aussi poser question. Enfin, cette méthode peut montrer ses limites lorsqu’il s’agit d’auditer des données hétérogènes comme les Opérations Diverses.
Indispensable de prime abord, l’échantillonnage n’est donc pas sans inconvénients. La méthode de sélection des éléments à contrôler fait d’ailleurs partie des points de défaillances repérés par le Haut conseil au commissariat aux comptes (H3C) au cours de ses contrôles de cabinets.
Les méthodes d’analyse exhaustive ouvrent de nouvelles possibilités
Le développement des technologies autour du big data, du data-mining ou de l’intelligence artificielle facilite la réalisation d’analyses exhaustives par les CAC et leur offre de nombreuses opportunités.
Ces méthodes peuvent d’abord être utilisées dans la phase préliminaire à leurs travaux, afin d’orienter leurs choix et méthodes d’audit. En analysant exhaustivement l’ensemble des écritures comptables, les professionnels peuvent orienter d’une manière plus efficiente leurs tests de détails en limitant le risque de non-détection et, paradoxalement, en évitant le sur-audit.
Ces technologies permettent aussi de gagner en temps et en efficacité pendant l’audit. Elles accélèrent l’analyse des sections pour lesquelles l’approche est traditionnellement exhaustive, notamment l’audit de la trésorerie ou encore des intérêts sur prêts intra-groupe. Elles facilitent l’examen de données telles que les Opérations Diverses (Journal Entries), par nature hétérogènes. Elles peuvent également être utilisées à des fins de contrôle de la qualité comptable.
Enfin, le recours à l’analyse exhaustive est un bon moyen de se différencier et d’améliorer la valeur ajoutée de la prestation du CAC, en lui permettant de mieux répondre aux attentes de ses clients et de démontrer l'intérêt de sa mission en dehors de l'obligation légale.
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Le FEC, un fichier source adapté aux analyses exhaustives
Alors que sa production est devenue obligatoire pour les entreprises, le Fichier des Écritures Comptables (FEC) constitue un support intéressant et disponible pour les CAC qui souhaitent mener des analyses exhaustives.
Comme il s’agit d’un fichier standardisé, il est possible de développer des algorithmes de recherche et de contrôle qui seront réutilisables d’un dossier à l’autre. Le CAC est certain de pouvoir exploiter les données du FEC et génère ainsi un gain de temps non-négligeable.
Reprenant l’ensemble des écritures d’un exercice, le FEC se prête aussi très bien à des contrôles exhaustifs visant à évaluer la qualité des comptes et du processus comptable. Le CAC peut par exemple rechercher l’ensemble des écritures dénuées de pièces justificatives, ou encore identifier des pièces justificatives postérieures à la date d’écriture. Plus généralement, l’exploitation du FEC en début d’audit lui permet de construire un plan d’audit plus adapté.
Certaines vérifications sont aussi faisables uniquement à partir de ce fichier. Il permet par exemple la mise en œuvre d’une analyse exhaustive rapide des taux d’intérêt déductibles sur les mouvements de trésorerie. Mais le FEC peut aussi être utilisé pour faire évoluer certaines méthodes d’audit. Le contrôle des états de rapprochements bancaires peut être complété par un test orienté sur les flux, en s’assurant que l’intégralité des flux présents sur un relevé bancaire se déverse bien en comptabilité.
Grâce aux nouvelles technologies d’exploration de données, les commissaires aux comptes sont désormais en mesure d’intégrer plus de contrôles exhaustifs à l’audit légal des comptes d’une société. Mais les avantages de ces nouveaux outils et méthodes peuvent aussi s’illustrer dans d’autres interventions des professionnels du chiffre. Alors que la loi Pacte a ouvert les possibilités relatives aux missions que peuvent proposer les CAC, l’analyse exhaustive peut aussi être à la base de nouvelles offres.
A propos de l'auteur
Experte métier
Imane prend la direction de l’équipe en charge de concevoir de nouveaux contrôles pour notre logiciel d’analyse du FEC.
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